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Devient-on plus sensible en vieillissant ?

Ce billet est extrait de la newsletter hebdomadaire « Darons Daronnes » sur la parentalité, qui est envoyée tous les mercredis à 18 heures. Vous pouvez vous inscrire gratuitement à cette newsletter en suivant ce lien.
Dimanche, nous sommes allés au cinéma en famille. Après avoir visionné trois bandes-annonces, nous avons opté pour Le Robot sauvage, nouvelle production américaine des studios DreamWorks. Au passage, je note que les trois films en lice, choisis un peu au pif parce qu’ils étaient programmés dans les cinémas de mon quartier, abordaient la question de notre rapport à la nature et au vivant. Les deux autres étaient Sauvages, le nouveau long-métrage de Claude Barras (Ma vie de courgette, 2016), et Angelo dans la forêt mystérieuse, de Vincent Paronnaud.
Mes trois enfants de 9, 6 et 5 ans se sont mis d’accord pour cette histoire de robot échoué sur une île déserte, qui se retrouve à élever un oison et à découvrir les sentiments. Nous voici donc dans la salle, face à Joli Bec et sa maman d’adoption en ferraille.
Au bout d’une demi-heure, tandis que se profile l’inévitable séparation mère-fils, mon fils, 5 ans, se met à hoqueter en répétant : « C’est trop triiiiiiste ! » Et que se passe-t-il ? Que fais-je, plutôt que d’endosser ma fonction de mère consolatrice aux épaules larges ? Je bredouille deux-trois inepties avant de me mettre moi-même à renifler en lui répétant que oui, c’est très triste. Quand les lumières se rallument, nous sommes en rang d’oignon tous les cinq, ravagés par les larmes, de 5 à 44 ans.
Si l’on m’avait dit, quand j’avais 20 ans, qu’un jour je pleurerais sur la destinée d’un volatile et d’une intelligence artificielle… Que s’est-il passé ?
Mon premier réflexe est de me dire que c’est parce que je suis devenue parent. Cette sensibilité excessive s’est manifestée dès les premières heures de ma fille aînée. Je me souviens que le jour de notre retour de la maternité, nous avons aperçu un tag dans notre rue qui disait : « Tu es chez toi ». Mon compagnon et moi y avons vu un signe du destin et en avons eu les larmes aux yeux. Deux heures plus tard, j’ai pleuré devant l’émission de téléréalité « Baby-Boom ». Autant vous dire qu’il ne m’en fallait pas beaucoup. J’avais mis ça sur le compte des hormones et du bouleversement. Je ne pensais pas que cela allait durer.
Et pourtant. Je lis à mes enfants Une histoire d’amour, de Gilles Bachelet (Seuil Jeunesse, 2017) ? Je pleure. Je lis Les Printemps, d’Adrien Parlange (La Partie, 2022) ? Je pleure. Je vois les platanes se parer d’un rouge chaque jour plus incandescent à la fenêtre ? Je pleure. Je regarde le destin de la famille Pearson, dans la série américaine This is Us (Prime Video) ? Je pleure.
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